Guidé par ses passions et ses découvertes, John Conway a rédigé de nombreux ouvrages passionnants mais malheureusement peu traduits.

Voyages parmi les nombres

Faisant suite à l’immense succès du jeu de la vie, Conway a publié en 1976 On Numbers and Games (Academic Press), republié en 2001 (AK Peters). L’écriture en est simple, humoristique et certains chapitres sont accessibles à des non-matheux. Bien que signé du seul Conway, on sait qu’il résulte de profonds échanges avec Martin Gardner (voir Tangente 136, 2010). La première partie de cet ouvrage fondateur de la théorie des jeux combinatoires, intitulée de manière amusante Zerothpart (« Partie zéro »), est consacrée… aux nombres, en particulier les surréels. First part se penche plus particulièrement sur des jeux avec deux joueurs nommés Right et Left et contribue à une réflexion sur les nombres qui y sont omniprésents.

John Conway et son ami Richard Kenneth Guy (1916 − 2020), lui aussi récemment décédé, font paraître en 1995 The Book of Numbers. Les deux compères nous offrent un fantastique voyage parmi les nombres, des entiers aux transcendants en passant par les imaginaires. C’est le seul ouvrage de Conway traduit dans notre langue (le Livre des nombres, Eyrolles, 1998) ; il est malheureusement définitivement épuisé.

 

Les trois mousquetaires de la théorie des jeux combinatoires

Martin Gardner est bien connu pour ses multiples talents et son militantisme contre les pseudosciences. Mais sa grande renommée lui vient de la chronique de récréations mathématiques qu’il tenait dans Scientific American. Sa passion pour les amusements mathématiques l’a rapproché de John Conway, mais aussi de deux autres très grands mathématiciens, Elwyn Ralph Berlekamp (1940 − 2019) et Richard Guy. Le premier fut l’un des fondateurs de la théorie des jeux combinatoires et l’auteur d’algorithmes de correction d’erreurs. Quant au second, il était spécialiste de la théorie des jeux et de celle des graphes.

Les trois hommes partageaient une amitié complice avec Gardner et, bien sûr, une passion pour les jeux mathématiques et la féérie des nombres. Ils unirent leur talent et leurs savoirs respectifs pour rédiger ensemble en 1982 Winning Ways for your mathematical Plays. La première édition de cet ouvrage (Academic Press) se compose de deux volumes qui traitent du jeu, tant de manière théorique que pratique. Le premier pose les fondements de la théorie des jeux combinatoires, le second décrit divers jeux aux règles non académiques. La deuxième édition (AK Peters, 2001 à 2004) comprend deux volumes supplémentaires : le troisième expose de nouveaux jeux et le dernier s’intéresse à différents casse-tête.

Avec Gardner en D’Artagnan, Conway, Berlekamp et Guy furent les trois mousquetaires de la théorie des jeux combinatoires.

 

Les ouvrages plus sérieux

Le succès de ses livres concernant les jeux pourrait faire oublier que Conway a publié également des ouvrages de mathématiques pures d’un intérêt capital. En lien avec ses études sur les réseaux de Leech et la découverte des groupes qui portent aujourd’hui son nom, Conway est l’auteur avec Neil James Alexander Sloane, en 1988, de Sphere Packings, Lattices and Groups (Springer), un ouvrage de référence sur l’empilement des sphères.

On Quaternions and Octonions (AK Peters et CRC Press, 2003), rédigé avec son étudiant Derek Alan Smith, présente de fascinantes propriétés de la géométrie dans ces algèbres. Les quaternions et les octonions sont des algèbres non commutatives de dimensions respectives 4 et 8, la seconde n’étant même pas associative.

Dans le magistral Symmetries of Things (AK Peters et CRC Press, 2008), rédigé avec Heidi Louise Burgiel et Chaim Goodman-Strauss, Conway revient vers sa passion pour les symétries en se plaçant à un niveau largement accessible dans les premiers chapitres (voir Découpages et Pavages, Bibliothèque Tangente 64, 2018).

John Conway est aussi l’un des auteurs, avec Robert Turner Curtis, Simon Philips Norton, Richard Parker et Robert Arnott Wilson, de l’ATLAS of Finite Groups paru en 1985, puis corrigé et réédité ensuite. Cet ouvrage de référence a fait l’objet de débats en 2015 (quant à la reproductibilité de certaines tables nécessitant des calculs lourds). Des vérifications indépendantes ont depuis pu confirmer tous les résultats publiés.