La courbe du dragon

Michel Criton




Inventée au milieu des années 1960 par trois jeunes physiciens de la Nasa, John Heighway (né en 1947), Bruce Banks (né en 1942) et William Harter (né en 1943), la courbe du dragon a été popularisée par Martin Gardner dans sa rubrique de jeux mathématiques du Scientific American en 1967.

On peut réaliser les premières étapes de la construction d’un dragon à l’aide d’une simple bande de papier.

 

 

On plie la bande de papier en deux, par exemple en rabattant le haut de la bande vers la droite. Pour les étapes suivantes, on plie l’ensemble en deux, en rabattant toujours le haut du même côté.

 

 

 

Ensuite, on déplie la bande, en respectant le sens des plis et en faisant en sorte que chaque pli forme un angle droit. Ont été réalisées ici les cinq premières étapes avec une bande de papier épais découpée dans la longueur d’une feuille A4.

En pratique, il est difficile d’aller plus loin avec une telle bande. Qu’en serait-il avec une bande plus longue ? Eh bien, on serait également très vite limité en raison de l’épaisseur du papier. Celui qui a été utilisé ici (160 g / m2) a une épaisseur d’environ 0,17 mm.

1. Supposons que l’on puisse plier dix fois une très longue bande de cette épaisseur sur elle-même. Quelle serait alors l’épaisseur de l’ensemble plié ?

 

Le codage de la courbe

 

Il est donc préférable d’utiliser l’outil informatique pour aller plus loin. La figure suivante représente la courbe obtenue après douze itérations du processus de construction. On comprend qu’on lui ait donné le nom de courbe du dragon ! La croissance est exponentielle puisqu’à chaque étape on double le nombre de segments.

 

 

La courbe d’ordre 12, sur laquelle les angles droits ont été « arrondis ».

 

 

On peut coder la courbe avec des 0 et des 1 en la parcourant : 0 correspondra à un virage à gauche et 1 à un virage à droite. À l’aide de ce codage, les premières étapes de la construction sont :

Étape 1 : 1

Étape 2 : 11

Étape 3 : 1101100

Étape 4 : 110110011100100

 

Pour passer de l’étape n à l’étape n + 1, on procède comme suit :

• On écrit le codage de l’étape n ;

• On ajoute 1 ;

• On ajoute ensuite le codage de l’étape n écrit à l’envers et dans lequel on a remplacé les 0 par des 1 et les 1 par des 0.

Dans la pratique, cela revient à dupliquer l’étape n, puis à faire effectuer une rotation de 90° au duplicata autour de son extrémité, puis à raccorder les deux extrémités, le raccord correspondant toujours à un virage à droite.

 

 

Si l’on revient au pliage papier, il est donc possible de ne pas procéder à un grand nombre de plis. On peut par exemple effectuer seulement quatre plis sur un grand nombre de bandes, puis raccorder deux bandes de même longueur avec le procédé décrit ci-dessus. On passe donc d’une étape à la suivante en la dupliquant, puis en recollant convenablement les deux morceaux.

 

La courbe du dragon ne se recoupe jamais elle-même, mais on constate qu’à partir de la quatrième étape, elle forme des « boucles », qui vont ensuite devenir de plus en plus nombreuses. Ces « boucles » correspondent à des carrés presque fermés. Dans les codages, on n’a jamais quatre « 1 » ou quatre « 0 » consécutifs. En revanche, on trouve des successions de trois « 1 » ou de trois « 0 », qui correspondent à des boucles.

Dès que deux « 0 » consécutifs apparaissent à la fin du code d’une étape de la courbe, dans l’étape suivante apparaît une boucle puisqu’on aura alors trois « 1 » consécutifs (le « 1 » central plus deux « 1 » résultant de la conversion des deux « 0 » terminaux).

2. La première boucle apparaît à l’étape 4. Combien de boucles a-t-on à l’étape 10 ?

 

 

SOURCES

- Mathematical Magic Show. Martin Gardner, Mathematical Association of America, 1990.

- Le site Matchcurve : https://mathcurve.com/fractals/dragon/dragon.shtml