Arithmétique au théâtre


Elisabeth Busser

Reality, de Daria Deflorian et Antonio Tagliarini, la pièce s'est jouée cet automne au théâtre de la Colline à Paris (XXe) et ce ne sont pas tant les personnages de la pièce qui nous intéressent que la relation de l'héroïne, Janina Turek, avec les chiffres.

 Rarement on a autant parlé de chiffres sur une scène : le fait est que Janina est « arithmomane ». Elle ne peut s'empêcher, à longueur de vie, de comptabiliser la moindre de ses actions, notant tout scrupuleusement : les 38 196 appels téléphoniques qu'elle a reçus, les 23 397 personnes à qui elle a dit bonjour, les 1 922 rendez-vous qu'elle a pris, les 5 817 cadeaux qu'elle a offerts, les 19 parties de dominos qu'elle a jouées, les 70 042 émissions de télévision qu'elle a regardées. C'est bien simple : il y en avait 748 carnets ! On peut se demander si manier les chiffres aussi compulsivement n'est pas une façon d'échapper à soi-même. D'ailleurs, Janina ne l'avoue-t-elle pas lorsqu'elle dit : « Je vis ou je feins de vivre ? Toutes ces notes, toutes ces statistiques, n'est-ce-pas une façon de m'illusionner ? Si j'arrêtais d'écrire, je devrais retourner à moi-même. » ?

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