Né le 22 février 1796 à Gand, français, hollandais puis belge après 1830, Adolphe Quetelet (1796‒1874) est le type même du polymathe cultivé, œuvrant dans d’autres domaines scientifiques que les mathématiques pures après avoir soutenu une thèse en géométrie.

 Il y a d’abord les sciences de la nature, regroupées autour de l’astronomie et de la météorologie ; il fut créateur puis directeur de l’observatoire à Bruxelles. Il y a ensuite les sciences de l’homme développées à partir de données statistiques. Son ouvrage Sur l’homme et le développement de ses facultés ou Essai de physique sociale (1835) est à la base de disciplines en formation ‒ sociologie, démographie, anthropométrie, criminologie. Enfin, le calcul des probabilités constitue un dernier centre d’intérêt.

Dans sa réflexion, Quetelet a transposé les outils de la théorie des erreurs en astronomie en une théorie des moyennes dans les sciences de l’homme : sous certaines conditions liées à la distribution des observations, les moyennes peuvent s’interpréter en termes de caractéristiques de l’« homme moyen », considéré comme le centre de gravité des groupes sociaux.
 

 

 

Statistique d’État et arithmétique politique : même combat

Quetelet a joué un double rôle dans le développement de la statistique. Il a d’abord réussi à unifier deux traditions. La première concerne la description des caractéristiques d’un État développée dans les universités allemandes et reprise dans les bureaux de la statistique et les enquêtes départementales de la période napoléonienne. La seconde est l’arithmétique politique qui se donnait les moyens de chiffrer les phénomènes sociaux.

Quetelet a créé deux institutions : la Commission centrale de statistique à l’échelle nationale et régionale (1841) et le Congrès international de statistique dont les sessions auront, de 1853 à 1876, un rôle capital dans la professionnalisation, la fiabilisation et l’harmonisation des travaux statistiques (enquêtes, recensements, registres, tableaux et publications).

À partir du milieu du XIXe siècle, un intérêt croissant pour la variabilité développée par les écoles statistiques allemande (avec Wilhelm Lexis) et britannique (avec Francis Galton, Francis Ysidro Edgeworth ou encore Karl Pearson) a combattu la trop grande part faite à la moyenne par Quetelet. Mais on sait, nonobstant ce retour de balancier et malgré la statistique mathématique qui s’en est suivie, combien la prégnance de la moyenne est restée forte dans nos raisonnements comme dans les indicateurs sociaux qu’ils ont produits.

 

Références :

Adolphe Quetelet (1796‒1874). L’œuvre probabiliste. Michel Armatte et Jean-Jacques Droesbeke, Ined Éditions, 2023.

Adolphe Quetelet, passeur d’idées. Jean-Jacques Droesbeke, Académie royale de Belgique, 2021.