Il n’y a pas plus trompeur qu’un raisonnement inductif mal construit. D’ailleurs, ne nous met-on pas en garde ? « Ce n’est pas parce que l’on vient de tirer cinq fois “pile” avec une pièce qu’elle a moins de chances de tomber sur “pile” au sixième lancer ! » nous avertit le professeur, avant d’ajouter, en ponctuant ses syllabes : « Les évènements sont in-dé-pen-dants. » À l’inverse, comment ne pas voir une loi des séries quand le destin s’obstine ? Le mathématicien du XXe siècle Bertrand Russell (voir notre dossier dans Tangente 206, 2022) aura, lui, cité l’exemple d’une dinde de Noël : généreusement traitée chaque matin, ne prend-elle pas confiance en la main nourricière qui lui tordra pourtant le cou le soir du réveillon ?
Qui croire, alors ? Le professeur, Russell, ou… Laplace ? Eh bien chacun d’eux, car tout dépend des hypothèses ! En particulier, l’approche bayésienne va éclairer la démonstration de Laplace, qui évaluait à 0,99999945 la probabilité que le Soleil se lève à nouveau le lendemain.
Des lancers « indépendants »
Laplace fonde sa réflexion dès 1774 dans son traité Mémoires sur la probabilité des causes par les évènements, et l’illustre quarante ans après sur la succession des jours dans son Essai philosophique sur les probabilités.
Commençons par ...
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