Un effet sournois : La méta-compréhension


Daniel Justens

Comment les mathématiciens choisissent-ils les mots pour nommer de nouveaux concepts ? Ils s'inspirent du monde qui les environne et des images mentales qui se forment quand ils évoquent ces nouveaux objets. Ce faisant, des termes courants acquièrent un nouveau sens, générant parfois de la confusion...

En mathématiques, le recours à un langage clair et précis, utilisant exclusivement des concepts préalablement définis, est indispensable à la transmission de résultats précis à la teneur univoquement définie. La rigueur de la pensée scientifique ne peut se passer d'une telle exigence. Mais lors de l'introduction et de la définition des concepts mathématiques, le choix lexical n'est pas neutre. Certains mathématiciens jouent sur l'ambiguïté des termes choisis, allant jusqu'à construire un système syntaxique complet prolongeant le langage usuel de manière troublante. Cette attitude n'est pas sans effet sur le niveau de compréhension des résultats par le grand public, introduisant sournoisement un niveau de méta-compréhension, voire de sous-compréhension. Pourtant, comme le propose Maurice Allais, « tout auteur qui utilise la mathématique devrait toujours s'astreindre à exprimer en langage courant la signification des hypothèses qu'il admet et la signification des résultats qu'il obtient. Plus sa théorie est abstraite et plus cette obligation est impérieuse ».

 

Jargon et langage courant 

 

Les transferts de champs lexicaux se font dans deux sens. On observe un passage du jargon scientifique vers le langage courant. Les notions matheuses les plus transparentes pour le profane sont celles que l'enseignement secondaire privilégie. Tous les termes de la géométrie euclidienne ont acquis droit de ... Lire la suite