Une philosophie du savoir appelée bayésianisme



La formule du savoir

Lê Nguyên Hoang
EDP Sciences
2018
406 pages
49 €

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Lê Nguyên Hoang, 31 ans, a fait l’X puis une thèse sur la théorie des jeux à Montréal (Québec). Il a fondé Science4All, une chaîne de vulgarisation scientifique à découvrir, et travaille à l’École polytechnique fédérale de Lausanne (Suisse).
Son ouvrage présente une philosophie du savoir appelée bayésianisme, basée sur la notion de probabilité subjective. « Pendant la Seconde Guerre mondiale, l’armée de l’air anglaise avait remarqué que les avions qui revenaient de la bataille étaient criblés d’impacts partout sauf à l’avant. D’où elle conclut qu’il fallait réduire le blindage à l’avant pour le renforcer à l’arrière. » Mais un statisticien s’inscrivit en faux contre ce préjugé, car le moteur se trouvait à l’avant et peu d’avions dont l’avant avait été touché revenaient…
Le bayésianisme s’oppose à la méthode scientifique traditionnelle. « Imaginez-vous à Paris. Votre stagiaire est à Hawaii. Juste avant minuit, il lancera deux dés. S’il tombe sur un double six, il vous dira que le soleil a disparu. Sinon, il vous dira si le soleil a disparu. Minuit sonne. Votre stagiaire appelle et dit que le soleil a disparu. » Le fait que votre stagiaire vous a dit cela, sachant que le soleil n’a évidemment pas disparu, est hautement improbable (probabilité de 1/36, soit environ 0,028). Donc un fréquentiste (non-bayésianiste) arrive à la conclusion, absurde, que le soleil a disparu !
Le livre se fonde naturellement sur les mathématiques : probabilités et statistiques, logique, cryptographie et arithmétique, théorie des jeux… Tout en étant basée sur des raisonnements pointus, la réflexion est formulée en termes simples. L’originalité du livre est de s’appuyer également sur plusieurs autres sciences : physique, chimie, biologie évolutionniste, économie, neurosciences et sciences cognitives, informatique théorique et intelligence artificielle. Il aborde aussi la philosophie et la morale, frôle la politique lorsqu’il explique comment le Web rend le mode démocratique mal informé, biaisé et irrationnel.
Quelques rares passages de très haut niveau mathématique sont signalés par un astérisque. Dans son ensemble, le texte est à la fois rigoureux et narratif, à la portée d’un public assez large car un exemple concret éclaire chaque abstraction.



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