Vous vous souvenez sans doute que le mathématicien russe Grigori Perelman (né en 1966) a résolu la conjecture de Poincaré au début des années 2000 (voir Tangente 175, 2015). Pour son premier roman, d’une noirceur insondable, Yann Brunel s’inspire de cet évènement. Le mathématicien, qui s’appelle ici Dmitri P., est aux prises avec de multiples démons : mort violente de sa mère et de son frère, relations haineuses avec son père, alcoolisme, refus d’une vie sociale « normale » (il dort dans une cabine téléphonique), extrême brutalité du Quartier, abandonné à la drogue et où les gangs font la loi (heureusement, Dmitri est protégé par le puissant Marquis)… Il fut pourtant respecté et reconnu comme l’un des plus grands mathématiciens de son temps. L’arrivée simultanée d’un fonctionnaire de police et d’une infirmière, qui concorde avec l’obligation de s’occuper de son père devenu impotent, bouleverse la vie chaotique de Dmitri. Il va devoir se confronter à son passé pour retrouver sa fécondité mathématique.
Dans un style extrêmement imagé, le roman, dont chaque chapitre commence par un récent résultat de topologie, développe une intrigue psychologique haletante. Le style très vif et alerte, qui n’hésite pas à user et abuser de métaphores souvent originales, communique une dynamique et un entrain qui compensent la violence et la noirceur du cadre.