Le principe du cinéma repose sur la projection d'images successives fixes (un phénomène discret), que notre cerveau réinterprète comme un phénomène continu. On retrouve ce principe dans le folioscope (appelé aussi flip-book), qui consiste en un carnet dont les pages sont le support de dessins correspondant à un mouvement. Lorsque l'on effeuille le carnet avec le pouce, on a l'illusion d'un mouvement.
On a longtemps expliqué ce type de phénomène par la persistance rétinienne. En 1829, le mathématicien et physicien belge Joseph Plateau établit qu'une image qui se forme sur la rétine met environ un douzième de seconde avant de s'effacer. Ainsi, en dessous du seuil de douze images par seconde, nous voyons une succession d'images fixes, et au-delà, nous avons une impression de mouvement, d'abord saccadé, puis de plus en plus fluide lorsque la fréquence augmente.
Joseph Plateau (1801–1883).
Mais cette persistance n'explique pas l'impression de mouvement continu. C'est notre cerveau, qui, par ce que l'on nomme l'effet Phi, comble les manques entre les images fixes afin de « voir » un mouvement continu.
La symétrie déjantée
Aux débuts du cinéma, les films comportaient seize ou dix-huit images par seconde. La fréquence a ensuite été normalisée à trente images par seconde, d'où l'impression d'accéléré et de saccadé lorsque nous visionnons de très vieux films. Mais revenons à l'illusion des roues de voitures semblant tourner à l'envers.
La plupart des jantes de voitures présentent une symétrie d'ordre 5. Supposons qu'une roue de voiture ait un diamètre de 60 cm. À quelle vitesse doit rouler la voiture pour qu'on ait l'illusion à l'écran que la roue ne tourne pas ? La roue doit tourner de n × (360°/5) par trentième de seconde (n étant un entier naturel), soit 30n × 72° par seconde. Une rotation de 72° des roues correspond à un déplacement de la voiture de 0,6 π / 5 m. Pour que les rayons de la jante paraissent ne pas tourner, il faut donc que la voiture avance de n × 3,6π m/s, soit une vitesse multiple d'environ 40,7 km/h.
De 0 à 40,7 km/h, on voit les roues tourner dans le bon sens. À 40,7 km/h, elles semblent figées. Entre 40,7 km/h et 81,4 km/h, on les voit tourner à l'envers ; à 81,4 km/h, elles apparaissent à nouveau figées. Entre 81,4 km/h et 122,1 km/h, on les verra à nouveau tourner à l'endroit…
Mais il existe aussi des jantes « sport » avec des symétries d'ordre 6, 7, 8, 9… Pour chacune de ces jantes, toujours en supposant un diamètre de roue de 60 cm, quelles sont les vitesses, en km/h, pour lesquelles les roues apparaîtront figées ?