La théorie des catégories, un « abstract nonsense » ?


Marc Thierry

L’essence des mathématiques modernes est l’abstraction, en particulier depuis les années 1930 avec l’émergence du concept de structure. Mais dès les années 1940 apparaît un nouveau concept, les catégories, accompagné des idées de foncteur et de transformation naturelle.

Définir une catégorie nécessite de se donner une collection d’objets et, pour chaque couple d’objets, un ensemble de morphismes du premier objet vers le second. Par exemple, on considère la collection des ensembles et, si E et F sont deux ensembles, l’ensemble Mor(E, F) peut être l’ensemble des applications de E vers F ; E est alors le domaine d’un élément f de Mor(E, F) et F son codomaine. On note souvent f : E → F pour exprimer que f est une application de E vers F. Dans le cas où F = E, on dispose d’un élément particulier dans Mor(E, E) : l’application identique, notée IE. Enfin, si E, F et G sont trois ensembles et que l’on considère : E → F et g : F → G deux applications telles que le codomaine de la première soit inclus dans le domaine de la seconde, on définit alors
g o f : E → G, la composée de f et de g. Cette opération o, lorsqu’elle est définie, est associative. La catégorie ainsi définie est souvent notée ENS.

Assez clairement, la notion de catégorie des ensembles relève d’un niveau d’abstraction supérieur à celle d’ensemble, considérée à la fin du XIXe siècle par Georg Cantor. Elle fut introduite par les mathématiciens américains Samuel Eilenberg et Saunders ... Lire la suite